A l'amour, à la mort.


RIP.
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C'est avec la plus profonde tristesse que je viens vous annoncer la mort de Mr Christian dont vous avez été nombreux, il vous en aurait remercié, à suivre les aventures en 3 épisodes publiées sur ce site (Liens en bas de cette nouvelle).

Aucune réunion funèbre ni célébration ou cortège quelconque n'a été organisé car, comme vous ne le saviez pas, Christian encore assez jeune, n'avait, malgré prestance, fortune et qualités intellectuelles voire humaines qui lui ont valu, jusqu'à un événement bien précis, de savourer une popularité et une reconnaissance grandement liées aux caractéristiques décrites ci-dessus, plus aucun ami ni amie, pas d'enfants, plus de parents ni famille éloignée.

Cette discrétion d'abord subie, il l'avait ensuite cultivée jusqu'à son profil Facebook qui, et c'est un des mérites de ce réseau social en ce qu'il peut aussi permettre d'évaluer la profondeur ou la superficialité des membres, affichait non pas une série de portraits narcissiques mais bien un certain nombre de commentaires et liens vers des sites potentiellement intéressants.

Bref, il n'empêche qu'il était complètement seul et ce depuis qu'un échec amoureux dont il se savait entièrement coupable lui avait fait réévaluer les priorités dans sa vie jusqu'à choisir une forme de solitude virtuellement rassurante.

Voilà bien ce qui, moi qui le connaissait si bien, à savoir ce retournement complet qui d'une vie privée et professionnelle jalonnée de réussites fulgurantes, de succès insolents qui, immanquablement avaient encore accentué sa faculté de plaire au point que, pris dans ce véritable tourbillon séducteur, il avait "joué" un coup de trop avant de prendre conscience, mais trop tard, de sa terrible erreur.
Et tout athée invétéré qu'il était, je fus le seul à pouvoir constater que, tel un moine qui vit reclus en communion avec "son" dieu, il se mit en retrait total de toute invitation, sollicitation jusqu'à survivre avec pour seule compagnie, la présence continue quasi mystique de cette créature idéale, amour perdu, gâché mais affreusement absente à laquelle, en silence, il consacra, sans que cela soit pour autant sacrificiel tant il ne pouvait envisager une autre vie, toutes ces années de solitude avec, chevillé à l'esprit, l'espoir constant, à de trop rares occasions effleuré, qu'un jour, il pourrait revivre heureux avec celle qui occupait tout l'espace tant de son esprit que son corps.


Histoire d'un MDR!

En fait, notez et c'est Christian qui vous parle, tout s'est passé le jour où la nuit je ne me suis pas réveillé.
Je me suis bien dit que je devais rêver ou plutôt cauchemarder mais j'avais beau tenté de respirer, rien n'y faisait, je ne bougeais plus.
L'angoisse me nouait la gorge m'empêchant de crier à l'aide.
De toute manière, crier à l'aide quand on est tout seul...
Restait à me lever et à téléphoner à l'amour de ma vie (VF) pour lui dire une dernière fois combien elle m'avait manqué et que je m'en étais tellement voulu depuis tant d'années au point que mon isolement autodestructeur avait contribué à me faire mourir à petit feu mais là encore, pas moyen de lever le doigt...même majeur!.

Alors que faire?.
Appeler les secours m'était impossible et donc, il me restait à écouter le silence assourdissant de mon cœur qui ne battait plus et à attendre que quelqu'un, un jour...

Oui mais, je ne vous dis pas l'odeur putride qui commençait à s'exhaler de ce corps inerte au point que je me surpris à remercier dieu sait qui de ne plus être en capacité de respirer...ma propre odeur!.
Là maintenant, à l'état de presque squelette momifiée, je reconnais que je me moque éperdument de la réaction de ceux qui découvriront un corps presque nu, l'essentiel (enfin, ce qu'il en reste!) est vaguement caché par un caleçon probablement bien trop large!.


Dans mon délire mortuaire et avant que je l'oublie (les trous de mémoire sont maintenant à prendre tant au propre qu'au sale qui remplace désavantageusement le figuré), il faut absolument alerter les écolos et toutes les associations de défense de la nature que, comme me l'ont confirmé tous les enterrés, mettre les corps de morts, malades porteurs de quantités de bactéries, virus et médicaments ou traitements cliniques, en terre recouverts de linceuls ou enfermés dans des boîtes nuit considérablement à la couche de terre perméable et aux nappes phréatiques, sources diverses et par conséquent à toute notre chaîne alimentaire...qui n'a alors de "bio" que le nom.
Ceux-celles condamnés à pourrir dans ces terres vous prient de bien vouloir changer les lois, les mentalités pour que la terre à laquelle les morts sont, pour cause, les plus attachés ne soit plus une déchetterie à ciel fermé!.

Ayez, vivants, une pensée pour ceux qui cherchent toujours la cachette aux cent mille vierges avec m'a t'on révélé la circonstance pénible suivante (nouvelle loi des genres oblige) qu'enterrer des mecs face à la mec(que) en position de prières, leur réserve souvent de désagréables intromissions postérieures...
Pas franchement aux anges non plus, ceux qui, sur leur petit nuage, attendent au bout du fameux "couloir de la mort" que le concierge Pierre leur ouvre une hypothétique porte.
Et ne parlons pas des juifs circoncis ou en papillotes pour qui la crémation risque d'être un shoah (choix: en phonétique) difficile au vu de l'histoire nazie.


D'autre part, si vous pensez qu'il règne dans les cimetières un silence de mort, détrompez-vous notamment parce que si, en tant que vivant, vous pouvez vous éloigner de votre famille que vous n'avez pas choisie, que vous avez les ami(e)s que vous méritez ou désirez, une fois mort avec option enterrement et surtout si, par malheur, votre famille vous accorde une concession de plusieurs années, vous n'imaginez pas les bisbilles entre locataires de pierres tombales même si dans le court laps de temps vers ma crémation durant lequel on vous fait part des avantages et inconvénients des autres formules d'après-mort, au cas où vous changeriez d'avis!, certains en état de dépression avancée ou éternellement à la recherche de leur moitié tentent bien d'organiser des sorties dansantes aux lampions des feux follets desquels ceux-celles qui, vivants, ne tenaient pas la boisson, là ne tiennent plus rien du tout et, souvent, se perdent lamentablement pour se planter dans n'importe quel trou...

Encore bienvenu pour ces malheureux zombies que de plus en plus de croyants préfèrent maintenant se rassembler par confessions évitant ainsi déjà de nombreuses querelles (ou quenelles?) de clochers et autres minarets!.
Au moins la crémation préserve de tout tracas qui, j'en ai vu, rendent les mines de la presque totalité des "six pieds sous terre" totalement défaites, décomposées pour ne pas dire méconnaissables d'où l'impérieuse nécessité de les étiqueter.


Euthanasie: une évidence

Fondamental que d'évoquer l'exigence "vitale" réclamée à corps et à cris, donc en silence, par les morts qui sortent des hôpitaux en pièces détachées vaguement remontées pour faire bonne figure auprès des proches, que de considérer que celui-celle qui souffre de graves maladies incurables a le droit intangible de décider de partir dans la dignité et dans le délai et les termes que lui/elle seul(e) choisit.

Tout le discours qui tend à privilégier la (sur)vie (in)humaine n'est que balivernes égoïstes de l'entourage en bonne santé qui refuse le départ de la seule personne qui souffre le martyr ou qui, appareillé et/ou perfusé n'a plus aucun respect de lui-même mais doit attendre le bon vouloir de l'équipe médicale ou de proches qui, au final, finiront peut-être par estimer que le tracas causé par les visites avec la fatigue que cela induit d'autant plus si toutes les formalités d'héritage sont réglées, les autorisent à vous laisser partir.


EPITAPHE

Si, en référence au dicton populaire qui veut que ce sont toujours les meilleurs qui partent en premier, on pourrait presque se réjouir de le savoir disparu. 
Pour ma part, je suis certain que ce passage sur Terre fut, comme il a été décrit dans les billets intitulés (Mémoires d'un ...), absolument exceptionnel à plus d'un titre suscitant jalousie et envie au vu de ce parcours à succès multiples et rapides.
Et pourtant, un seul évènement amoureux aura réussi à enrayer cette belle mécanique humaine jusqu'au blocage de tous ses rouages la rendant totalement inintéressante, insipide et la contraignant à l'isolement complet jusqu'à la mort qui fut ressentie comme une réelle délivrance.

La seule raison de cet échec réside dans le fait que, lui habitué depuis toujours à contrôler sa vie, ses sentiments, ses aventures comprît que, pour la toute première fois, il se trouvait confronté, perdu dans une histoire d'amour vrai dont il ne maîtrisait plus du tout la trajectoire, l'avenir.
Alors, il commit la chose la plus lâche qui soit en bricolant un scénario sexuel sans intérêt qui, bien évidemment, brisa ce couple naissant avec, pour lui, des conséquences bien plus inattendues et catastrophiques que ce qu'il aurait jamais pu imaginer.


Ce sont aussi, par la suite, ces refus de s'ouvrir l'esprit et le corps à d'autres aventures, lui qui en avait fait ses seules références auparavant, qui l'ont isolé au point d'y perdre tout ce qui avait fait son charme, à savoir l'initiative, l'obstination et la pugnacité.
Un exemple édifiant de cette attitude négative est notamment celui qui, quelques temps avant sa mort, lui fit ne pas réagir lorsque sa dulcinée lui apprît qu'elle venait de divorcer et que des retrouvailles lui semblaient sinon probables au moins envisageables lors d'agréables rencontres futures.

Quoique conscient de la difficulté quasi insurmontable pour elle de convaincre son entourage familial et amical totalement rétif à l'idée qu'elle puisse revenir en arrière et "pardonner", au lieu de chercher à la voir, la convaincre de passer quelques moments privilégiés en tête à tête, il s'est obligé à lui laisser toute initiative de l'appeler se contentant de lui apporter toute l'aide affective possible afin qu'elle se sorte au mieux dans sa nouvelle vie, fut-ce au détriment de sa propre santé...jusqu'au jour où, bien évidemment, un autre dénué de tous scrupules aura su saisir  l'opportunité de "consoler" celle qui, fragilisée, succombera aux belles paroles et à cette présence qui se dit attentive et indispensable à sa reconstruction.


Et pour celle qui avait déjà su vivre tant d'années auprès d'un autre tout en (se) donnant l'illusion du bonheur, il ne devrait pas être insurmontable, d'autant que l'environnement de ses proches l'y pousse résolument, de jouer voire à faire semblant de vivre l'histoire qu'au fond d'elle-même elle se sera interdite de partager avec celui qu'elle disait être l'amour de sa vie.
Mais comment a t'il pu croire, se persuader que l'amour serait suffisamment fort, ancré dans le temps  et surtout réciproque pour vaincre les artifices d'une histoire banale qui voit, comme c'est habituel dans de pareils cas, un squatteur de l'amour qui, après une rapide évaluation des avantages qu'il peut tirer d'une femme potentiellement autonome mais victime de l'image révolue du couple stable, choisit de laisser son précédent cocon quelque peu défraîchi pour ce gîte tout neuf, si accueillant et tellement plus agréable à vivre grâce aux multiples atouts de celle qui l'y attend.

Cet excès de réserve quelque peu suicidaire aura finalement eu raison de Mr Christian sans que pour autant cela n'affecte son amour qu'il aura gardé intact, intense.
C'est donc ici et par ces mots que je veux rendre hommage à celui qui aura été vraiment quelqu'un d'unique même au prix de sa vie amoureuse et plus encore de sa vie tout simplement.

On entend souvent dire d'une vie que cela ressemble au récit d'une pièce de théâtre, au scénario d'un film mais, quelquefois, la réalité aussi romantique et exceptionnelle soit-elle ne connait pas a chance du "Happy end".
Ce témoignage ne nous apprendrait-il pas que plutôt que faire partie de la trop longue liste de ceux-celles qui se satisfont d'amours "coup de foudre" qui sont aussi éphémères que le temps de la décharge... ou d'amours de circonstances, raisonnés qui font dire aux concernés qu'ils ont (enfin) rencontré l'homme/la femme de leur vie comme s'il s'agissait d'un achat automobile ou immobilier qui finit, au bout d'un certain temps, par lasser, voire de se croire obligé de se conformer à l'image matérialiste du bonheur reflétée par le couple quel qu'il soit, ne vaudrait-il pas mieux s'élever, se distinguer en refusant toutes concessions aux habitudes faciles et ordinaires pour ne vivre qu'un amour tel que décrit soit total, spirituel et inconditionnel qui, au final, sera l'unique contrat que, contrairement au mariage, seule la mort pourra séparer...et encore!.

Ah oui, à propos..., les fantômes existeraient-ils, sinon qui aurait écrit ce qui précède?!.


Liens vers les 3 épisodes précédents:

Lien Mémoires d'un enfant...unique (épisode 1)
Lien Mémoires d'un enfant...unique (épisode 2)
Lien Mémoires d'un enfant...unique (épisode 3)